France - Vietnam : Entre héritages de l’histoire et quête d’un nouveau souffle


Sources : asiapacnews - indomemoires.hypotheses - asialyst
Parution originale : 31 Août 2016

Auteur : Pierre Journoud (1)


Le président de la République effectuera une visite d’Etat au Vietnam, les 6 et 7 septembre, aussitôt après sa participation au Sommet du G20 réuni pour la première fois en Chine. Voilà douze ans qu’un président français ne s’était pas rendu dans ce pays engagé depuis une trentaine d’années dans un processus d’ouverture internationale et de réformes structurelles (le Doi Moi) qui en a modifié partiellement, mais en profondeur, le visage.

 

Après la visite historique de François Mitterrand, venu en 1993 y « clore un chapitre pour en ouvrir un nouveau », Jacques Chirac, mû par une forte appétence pour les grandes et vieilles civilisations asiatiques, n’avait pas négligé l’Asie du Sud-Est et encore moins le Vietnam. Il était même allé à deux reprises à la rencontre des Vietnamiens : en 1997, à l’occasion du 7Sommet de la Francophonie, puis en 2004, lors du 15e Sommet de l’ASEM (Asia-Europe Meeting), deux grandes rencontres multilatérales accueillies pour la première fois au Vietnam par des autorités plus que jamais désireuses de conforter leur intégration régionale et internationale, après des décennies de guerre et de relatif isolement vis-à-vis du monde non communiste.

De Jacques Chirac à François Hollande : l’effacement du passé comme contrainte politique

 

En 2004, précisément, le passé était encore présent. Il fallait solder le cinquantenaire de la bataille de Dien Bien Phu et des accords de Genève qui avaient mis fin à la « guerre d’Indochine », accorder – pour la première fois au niveau du président de la République, grâce à l’action de l’Association nationale des combattants de Dien Bien Phu, dissoute peu après – l’hommage de la nation aux anciens combattants, et accompagner les colloques des historiens contemporanéistes qui s’étaient engagés, eux aussi de façon inédite, dans une fructueuse coopération scientifique.

 

Ce temps fort, à l’évidence le dernier en présence d’un si grand nombre de témoins, fut dominé par un esprit de compréhension, de respect et de dignité. Le passé s’était aussi invité par effraction : aux yeux des Vietnamiens et de leurs voisins chinois, la diplomatie française venait de se distinguer, en 2003, en renonçant à suivre les États-Unis de George W. Bush dans leur imprudente aventure irakienne. Cette posture de défiance à l’égard de l’« hyperpuissance » américaine avait alors fait resurgir le souvenir de l’opposition vibrante du général de Gaulle à l’engagement militaire massif des États-Unis au Vietnam et en Asie du Sud-Est dans les années 1960 même si, en 2004, l’intérêt de Hanoï, alors candidat à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), lui commandait de mettre en sourdine ses récriminations diplomatiques à l’encontre de l’ancien adversaire américain.

 

Dans la plus pure tradition gaullienne et plus offensif que jamais dans sa lutte pour le respect de la diversité culturelle, Jacques Chirac avait aussi, devant les étudiants rencontrés à l’Espace culturel français lors de sa seconde visite à Hanoï, fustigé l’hégémonie de la langue anglaise en l’accusant de « rétrécir la pensée » et de conduire à une « sous-culture générale » : « Dans un monde où il n’y aurait qu’une seule langue, avait-il averti, tout le reste disparaîtrait. Ce serait une catastrophe écologique. » La promotion de la francophonie se distinguant difficilement de celle des Droits de l’Homme, il avait remis discrètement à ses hôtes vietnamiens, comme son prédécesseur en 1993, une liste de prisonniers politiques à libérer – et dont certains le furent effectivement.

 

François Hollande n’aura pas à supporter le (sur)poids du passé. Sans doute, ses discours seront-ils émaillés de quelques formules convenues sur les « liens indéfectibles hérités de l’histoire » et la « proximité entre nos deux peuples ». Mais, les Vietnamiens sont jeunes, très jeunes : 65% des 90 millions d’habitants sont nés après 1980, plus de la moitié ont moins de 30 ans, et un quart environ, moins de 15 ans. Cette histoire ne leur parle plus. Même leurs dirigeants ne sont plus assez vieux pour avoir vécu, adultes, la colonisation et son dénouement. Né en 1944, Nguyen Phu Trong, secrétaire général du parti communiste, est le plus âgé des quatre plus importants membres du Bureau politique… Le réalisme politique, parfois non dénué de cynisme, l’emporte sur le facteur idéologique. Sans doute, François Hollande rappellera-t-il aussi aux dirigeants de l’État-parti vietnamien l’importance du respect des Droits de l’Homme, pour les inciter à octroyer de véritables libertés d’expression et de réunion publiques à une société civile embryonnaire encore privée de toute capacité d’opposition politique. Personne ne s’attend toutefois à des avancées décisives et encore moins rapides dans ce domaine, au moins tant que l’État-parti peut conforter par ses succès économiques une légitimité historiquement tirée de ses victoires politico-militaires contre le colonisateur et ceux qui lui ont succédé.

 

En France non plus, l’Indochine n’est plus un sujet de polémique. Les « anciens d’Indo » sont de moins en moins nombreux et ne constituent plus un lobby à proprement parler, à supposer qu’ils l’aient été auparavant. Avec Bigeard, leurs derniers hérauts ont disparu. Au-delà des vétérans, la perception globale des derniers régimes communistes de l’histoire a profondément évolué. Ni la Chine ne le Vietnam ne sont plus appréhendés avec les lunettes déformantes qui les avaient fait passer, auprès d’une partie de nos élites, d’un statut idéalisé au rang de paria. Le communisme, la colonisation indochinoise, la guerre, Dien Bien Phu, n’intéressent plus guère, à première vue, qu’une poignée d’historiens et de diplomates, d’écrivains, de réalisateurs et de cinéastes, stimulés par les bataillons un peu plus nombreux d’amateurs d’histoire politique, coloniale et militaire – souvent les mêmes. Aussi, les dirigeants français seraient-ils fondés, aujourd’hui, à faire de ce passé table rase.

 

La prégnance de l’imaginaire colonial

 

À bien y regarder, pourtant, le passé n’est pas mort. Il pèse encore, d’une façon moins conscientisée, sur la relation franco-vietnamienne.

 

Relativement nombreux sont encore les Français qui entretiennent le souvenir de cette page d’histoire commune, par leurs origines vietnamiennes (au moins 300 000 Viet Kieu) ou des attaches familiales nées de la colonisation, par leurs voyages touristiques au Vietnam (211 636 en 2015 contre un peu plus de 130 000 une décennie auparavant), leurs activités professionnelles et/ou associatives…

 

Côté pile : le romantisme suscité par le processus d’interpénétration de deux vieilles civilisations, corps et esprits, et tout ce qui a pu en surgir de constructif, fructueux et durable. Côté face : la gravité des malentendus, la cruauté de la guerre, le fiel de la défaite et l’humiliation de l’abandon des « populations amies ».

 

Confisquée par les idéologues de tout bord et presque totalement éradiquée de l’enseignement, en France, au point de n’être plus enseignée que dans de rares établissements universitaires, cette histoire a été d’autant plus fantasmée que l’imaginaire collectif ne pouvait plus satisfaire sa soif qu’au contact d’une culture exotico-érotico-coloniale, aux reflets aussi envoûtants que déformants. Des sources littéraires et audiovisuelles sur l’Indochine ont en effet jailli des images communes mêlant confusément, par touches impressionnistes, amours métisses interdits et violentes embuscades de guérilla, vieilles pagodes boisées et églises en pierre flambant neuves, liasses de piastres et mystérieuses fumeries d’opium, vastes rizières au vert dense et petites plantations clairsemées d’hévéas, chapeaux coniques intemporels et modernes complets-vestons, larges villas coloniales et maisons traditionnelles étroites, Université indochinoise et Temple de la littérature, Alexandre de Rhodes et Nguyen Van Vinh, Victor Hugo et Nguyen Du [prononcer Zou]… La puissance de cet imaginaire est telle, à propos du Vietnam, qu’il est encore difficile, aujourd’hui, de s’en extraire totalement. Ne trahirait-elle pas une part de notre histoire et de notre identité collectives, aussi sombre que lumineuse, de nos rêves accomplis et avortés, de nos combats gagnés et perdus, de notre innocence perdue puis reconquise ?

 

Un effort de démythification est pourtant nécessaire si l’on veut dégager une vision réaliste du bilan, des enjeux et des possibilités offertes au développement des relations franco-vietnamiennes. Deux écueils semblent devoir être évités.

 

Le mythe d’une relation privilégiée

 

L’erreur sans doute la plus fréquente, chez nous, est de se laisser convaincre que la France et le Vietnam sont liés entre eux par des liens privilégiés parce qu’hérités de l’histoire, et que, par la seule vertu du passé, ils se réserveraient l’un à l’autre une place de choix dans leur relation bilatérale. Certes, les Vietnamiens dans leur grande majorité, pragmatiques par nature et débarrassés du complexe du colonisé par leur retentissante victoire militaire sur le corps expéditionnaire français en 1954, ne veulent surtout retenir aujourd’hui que le versant positif des liens qui ont été forgés à l’épreuve de la colonisation.

 

De l’école Française d’Extrême-Orient à l’Institut océanographique de Nha Trang, d’Alexandre Yersin au chirurgien Pierre Huard, d’Alfred de Vigny à Françoise Sagan, de l’Opéra de Hanoi à l’hôtel de Ville (aujourd’hui siège du Comité populaire) de Saigon (devenu Ho Chi Minh-Ville), du pont Paul Doumer (devenu Long Bien) aux 1 700 kilomètres du Trans-indochinois (baptisé « la Réunification » en 1975 puis « le Renouveau » en 1989), de la route nationale (ex-coloniale) n°1 au vélo Peugeot et à la Citroën Traction Avant… tout ce qui les a enrichis, matériellement, intellectuellement et spirituellement, et qu’ils se plaisent à redécouvrir, tantôt avec nous, tantôt sans nous, est désormais considéré comme constitutif de leur patrimoine national.

 

Croire néanmoins que nous sommes attendus, parce que Français, relève d’une illusion qui ne peut conduire qu’à de brutales déconvenues. Passe encore que cette méprise ait été nourrie par les acteurs de la « pacification » coloniale – peu d’Européens, imbus de leur « mission civilisatrice », échappaient alors au complexe de supériorité dominant. Mais, il est plus surprenant de la voir parfois se perpétuer aujourd’hui dans la communauté française, notamment au sein de milieux d’affaires pas toujours assez modestes ni attentifs aux besoins du consommateur final.

 

Or, résolument engagé dans un processus d’insertion et de reconnaissance internationale depuis le tournant du Doi Moi, le Vietnam évolue d’abord et avant tout dans sa sphère d’influence traditionnelle, la péninsule indochinoise et l’Asie du sud-est, avec laquelle il a rétabli de multiples liens d’échanges, à l’échelle bilatérale comme dans le cadre régional de l’ASEAN, l’Association des Nations d’Asie du Sud-Est. Au-delà de ce premier cercle, il a démultiplié le nombre de ses relations diplomatiques avec les états étrangers (de 57, en 1986, à 169 au début des années 2000) tout en intensifiant son rapprochement avec les pays qui, à l’instar des États-Unis ou du Japon, pouvaient l’aider à contenir les ambitions jugées excessives et inquiétantes de son immense, dynamique et incontournable voisin, la Chine populaire.

 

Dans cette reconfiguration post-guerre froide, la France n’est aucunement privilégiée par rapport à ses concurrents asiatiques et même européens. Elle ne l’a d’ailleurs jamais été depuis la fin de la période coloniale, sauf entre 1954 et 1975 dans la République du (Sud-)Vietnam, ce prolongement du régime dont elle avait permis la naissance en pleine guerre d’Indochine pour contrebalancer l’État communiste fondé par Ho Chi Minh en 1945, avant d’être littéralement placé sous perfusion par les États-Unis pendant toute la durée de la guerre au Vietnam.

 

Peut-être plus encore que les autres, les Français doivent faire leurs preuves, convaincre, persévérer, être attentifs aux attentes. S’il n’existe, a priori, aucun lien privilégié entre la France et le Vietnam, il peut en naître, a posteriori, d’échanges réguliers et égaux, de coopérations durables et confiantes.

 

Le mythe d’une relation indifférente ou dépassée

 

La deuxième erreur consiste à penser, au contraire, que nos deux pays seraient devenus indifférents l’un à l’autre, séparés par une guerre, 10 000 km, un régime politique et soixante dix ans d’histoire. En réalité, jamais depuis la fin de la guerre d’Indochine, Paris et Hanoï ne se sont tourné le dos, malgré les vicissitudes de l’histoire et les divergences politico-idéologiques qui n’ont cessé d’être instrumentalisées par tous ceux qui, en France comme au Vietnam, croyaient nécessaire d’aggraver le fossé entre les anciens ennemis.

 

Dès 1954, après plus de huit années de guerre, près de 100 000 morts dans les troupes de l’Union française et – selon les estimations – 500 000 morts parmi les civils et militaires vietnamiens, les Premiers ministres Pierre Mendès France et Pham Van Dong avaient audacieusement posé les premiers jalons d’une normalisation des relations sous la forme d’une amorce de coopération commerciale et culturelle, en prélude à une nécessaire réconciliation. Mais, la partition provisoire du pays à laquelle les accords de Genève avaient prévu un terme au bout de deux par voie d’élections générales qui n’eurent jamais lieu, conduisit Paris à privilégier la République du (Sud-)Vietnam, où se trouvaient l’essentiel de ses intérêts économiques, culturels et pour tout dire clientélistes, au détriment de la moitié septentrionale sous régime communiste, avec lequel s’accumulaient les difficultés de coexistence, en particulier dans les établissements français d’enseignement et de recherche que nous nous efforcions alors tant bien que mal de maintenir.

 

Les pressions américano-sud-vietnamiennes achevèrent de dissiper rapidement ces velléités initiales. Dix ans plus tard, l’escalade et l’américanisation de la guerre au sud du Vietnam décidèrent le général de Gaulle, conscient des erreurs qui l’avaient conduit à privilégier l’option militaire en 1945, à répondre favorablement aux sollicitations exprimées par Ho Chi Minh et Pham Van Dong en faveur d’un rapprochement prudent mais volontariste avec l’ancien adversaire. Auréolé de son rôle dans la décolonisation africaine et libéré du fardeau algérien, de Gaulle nourrissait une stratégie de sortie de guerre dans la péninsule indochinoise – pour ne pas dire de guerre froide – que ne saurait résumer, à elle seule, la condamnation magistrale de l’aventurisme américain qu’il prononça dans le grand stade de Phnom Penh il y a très exactement 50 ans.

 

Devant Norodom Sihanouk, ancien roi devenu chef de l’État du royaume du Cambodge, et des dizaines de milliers de Cambodgiens admiratifs, mais contre l’avis de bien des « experts » en stratégie, il alla jusqu’à prophétiser l’échec militaire de la plus grande puissance mondiale : « Eh bien ! La France considère que les combats qui ravagent l’Indochine n’apportent, par eux-mêmes et eux non plus, aucune issue. Suivant elle, s’il est invraisemblable que l’appareil guerrier américain vienne à être anéanti sur place, il n’y a, d’autre part, aucune chance pour que les peuples de l’Asie se soumettent à la loi de l’étranger venu de l’autre rive du Pacifique, quelles que puissent être ses intentions et si puissantes que soient ses armes. Bref, pour longue et dure que doive être l’épreuve, la France tient pour certain qu’elle n’aura pas de solution militaire. À moins que l’univers ne roule vers la catastrophe, seul un accord politique pourrait donc rétablir la paix… »

 

Sa politique était fondée sur un rééquilibrage des relations avec le monde communiste et neutraliste asiatique, un retrait programmé des troupes américaines seul à même d’éviter l’implication sino-soviétique et la généralisation du conflit, ainsi qu’une neutralisation du Vietnam sanctionnée par une conférence internationale à laquelle devait participer la Chine populaire, reconnue officiellement par Paris en 1964. La cohérence et la constance des positions et des initiatives gaulliennes aussi bien publiques que secrètes furent récompensées, en mai 1968, par le choix de Paris comme lieu des négociations officielles puis très vite secrètes entre les belligérants.

 

En janvier 1973, la signature de l’accord de paix mit un terme à la phase américano-vietnamienne du conflit. Pendant toutes ces années d’intenses tractations entre les adversaires, la diplomatie française, aidée par quelques intermédiaires non officiels comme Raymond Aubrac, joua un rôle facilitateur discret, que les Vietnamiens ne manquèrent pas de saluer à l’issue des négociations. Pendant toutes ces années de guerre, marquées par une médiatisation sans précédent et sans retenue de l’hyper-violence, des dizaines de milliers de Français vibrèrent pour la résistance vietnamienne, l’intelligence de ses chefs, la résilience de la population, l’engagement des femmes. Avec une sincérité non dénuée d’une certaine naïveté sur un régime communiste qui, sous l’influence de l’aile radicale du parti, s’était discrètement enfoncé dans le totalitarisme, des milliers d’entre eux se mirent à militer contre la guerre, multiplier les initiatives humanitaires, nouer de courageuses coopérations scientifiques, fonder des structures associatives plus durables pour faire perdurer dans la paix les liens forgés à l’épreuve de la guerre. À travers cet engagement politique, humanitaire et humaniste très divers dans ses origines, ses modalités et ses soutiens politiques, les Français redécouvraient ainsi dans la péninsule indochinoise un horizon positif d’engagement et de coopération. Peut-être y trouvèrent-ils aussi cette parcelle généreuse de leur âme que la brutalité de la colonisation et l’incapacité à accepter une décolonisation pacifique avaient conduit à l’errance.

 

Après la guerre et la réunification du Vietnam sous l’égide du parti communiste, en 1975-76, les choix politiques, économiques et stratégiques désastreux de ce dernier auraient pu conduire à une rupture des relations franco-vietnamiennes, tant ils contrastaient avec le visage offert, et en partie fantasmé, pendant la guerre elle-même. Mais, l’attachement au sort de populations dramatiquement éprouvées l’emporta, sans distinction, qu’il s’agisse des 50 millions de Vietnamiens restés dans leur pays comme des centaines de milliers de Boat People qui le fuyaient alors par la mer et dont une partie fut généreusement accueillie en France. Tandis que les relations du Vietnam réunifié se dégradaient avec le « Kampuchéa démocratique » des Khmers rouges, et bientôt avec la Chine qui fit le choix cynique de défendre un régime génocidaire au Cambodge pour contenir un voisin vietnamien jusqu’alors allié mais devenu trop entreprenant, Paris et Hanoï surent aménager une transition vers la reprise d’une relation plus dense.

 

Leurs efforts, marqués par des échanges de ministres et la reprise d’une coopération culturelle et technique, furent couronnés par la visite de Pham Van Dong à Paris, en 1977, et celle de Louis de Guiringaud à Hanoï, l’année suivante, la première d’un ministre des Affaires étrangères français depuis 1954. Le grand virage soviétique décidé par Hanoï au même moment, puis l’intervention militaire de son armée au Cambodge et la guerre-éclair avec la Chine, en 1979, ne purent empêcher longtemps la reprise des échanges ministériels entre nos deux pays et encore moins leur poursuite tout au long des années 1980 : Hanoï reçut les visites de Jean-Pierre Chevènement, ministre de la Recherche, Claude Cheysson, ministre des Relations extérieures, Jack Lang, ministre de la Culture, Alain Decaux, ministre de la Francophonie, et de bien d’autres encore. Alors que le Vietnam ressentait durement le double effet de sa politique de collectivisation et d’un embargo presque total de la « communauté internationale », la France, avec une poignée d’autres pays européens, maintint sa porte ouverte.

 

Trois hypothèques qui pesaient sur la relation bilatérale furent alors levées : la première, à l’initiative du gouvernement de Jacques Chirac en 1986, permit de concrétiser le rapatriement trop longtemps différé des restes mortels de 27 000 soldats du Corps expéditionnaire français d’Indochine dans la nécropole de Fréjus, où débuta en 1988 la construction du Mémorial des guerres en Indochine inauguré par François Mitterrand à son retour du Vietnam, en 1993. Le gouvernement vietnamien prit, quant à lui, deux décisions majeures : la libéralisation de l’économie dans le cadre de la politique du Doi Moi officialisée en 1986, qui suscita rapidement l’intérêt des milieux d’affaires français ; et la libération, en 1987, de la quasi-totalité des anciens cadres et collaborateurs sud-vietnamiens maintenus en camp de rééducation depuis 1975, permettant ainsi une reprise du dialogue politique franco-vietnamien.

 

Renouant avec l’héritage de son ancien adversaire, la République du (Sud-)Vietnam, qui avait été membre fondatrice de l’Agence de coopération culturelle et technique en 1970, la République socialiste du Vietnam participa pour la première fois au 1er Sommet de la Francophonie accueilli à Versailles, en février 1986. Lorsque le Premier ministre cambodgien Hun Sen (parvenu au pouvoir grâce à l’occupant vietnamien) et Norodom Sihanouk se résolurent à négocier une sortie de crise au Cambodge, c’est encore sur le territoire français et avec l’active complicité de la diplomatie française que put, entre 1986 et 1988, se concrétiser leur intention.

 

Fruit d’une conférence multilatérale co-présidée par la France et l’Indonésie, le nouvel « accord de Paris » signé en octobre 1991 permit une résolution très progressive du conflit cambodgien et favorisa la réinsertion politique de la France sur la scène indochinoise. L’ONU se vit confier sa première grande opération post-guerre froide de restauration de la paix. Notre pays y prit toute sa part en affectant notamment 1 200 soldats à l’APRONUC pour contribuer au déminage des zones sensibles et à la formation des militaires cambodgiens dans de nombreux domaines. Occultant soigneusement leurs propres responsabilités dans les exactions et la survie du pire régime génocidaire de l’histoire depuis 1945, la Chine, l’Occident, et leurs soutiens asiatiques, se détournèrent du Cambodge et normalisèrent progressivement leurs relations avec Hanoï, privé avec l’implosion de l’URSS de son principal soutien militaire, économique et financier.

 

Enfin sorti de ce conflit qui l’avait acculé à l’impuissance pendant une décennie, le Vietnam put alors tourner son regard vers une Europe en voie de réintégrer les anciens pays communistes placés sous le joug soviétique et redevenue bienveillante à son égard. La France qui n’avait jamais cessé de l’être malgré sa condamnation formelle de l’occupation militaire du Cambodge par le Vietnam, a constamment et activement soutenu la volonté d’intégration internationale des dirigeants vietnamiens. Elle a défendu successivement la levée totale de l’embargo américain, effectif en 1994 ; la normalisation avec les États-Unis, concrétisée en 1995 ; et l’intégration du Vietnam à l’ASEAN la même année. François Mitterrand, premier chef d’État occidental et président de la République française à se rendre au Vietnam en février 1993, sut donner à la relation franco-vietnamienne une nouvelle dynamique, situant l’action de la France sur la longue durée : désenclavement du pays, modernisation de l’État (Finances publiques, Justice, Santé, Commerce, Administration centrale…), développement de formations étudiantes et professionnelles au Vietnam et en France, aide à la modernisation du droit (notamment civil et commercial) sous l’égide de la Maison du Droit vietnamo-française ; encouragement à la coopération décentralisée et aux contacts entre les sociétés civiles, etc.

 

En soutenant pleinement ce tournant vietnamien de l’ouverture et de la modernisation dans un contexte de mondialisation accrue, avec l’espoir de favoriser un processus de démocratisation, François Mitterrand savait bien qu’il faciliterait l’arrivée de concurrents économiques aussi redoutables que les États-Unis et leurs alliés asiatiques, et qu’il précipiterait ainsi, à terme, la perte d’une position encore favorable de notre pays dans la péninsule indochinoise. Mais il assuma cette politique en homme d’État conscient des évolutions inéluctables et de la nécessité d’en prendre date.

 

Depuis lors, si l’on peut parler d’une singularité historique de la relation vietnamienne, sans autre équivalent pour la France en Asie, les concurrents asiatiques et européens se sont multipliés et les relations franco-vietnamiennes, banalisées, au point de nourrir certaines déceptions.

 

Entre frustrations, espoirs et solidarités

 

La prégnance de certains préjugés dans une partie des élites françaises explique sans doute, plus que la conjoncture économique et les réductions budgétaires, les déceptions de ces dernières années et le constat largement partagé d’un déficit de nos relations par rapport à leurs potentialités. Faut-il rappeler que la part française dans le marché vietnamien reste inférieure à 1%, et que, malgré une augmentation récente de nos exportations, notre balance commerciale demeure déficitaire avec ce pays ? Nous sommes bien loin de l’objectif de doublement des parts de marché de nos entreprises en quatre ans que la ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq avait fixée lors de sa visite en avril 2013.

 

Le « partenariat stratégique » franco-vietnamien signé par les Premiers ministres Jean-Marc Ayrault et Nguyen Tan Dung, le 25 septembre 2013 à Paris, a sanctionné, il est vrai, une relation globale de qualité, désormais étendue à tous les grands domaines de la coopération bilatérale : politique, économique, militaire, juridique, culturelle et scientifique, parlementaire, universitaire, journalistique, littéraire, touristique, associative, muséale, sportive, etc.

 

On sait peu que la France fut même le premier pays occidental à formaliser, dès 1997, une relation de défense avec le Vietnam. Après l’ouverture d’un poste d’attaché militaire à Hanoï, en 1991, après le succès de la collaboration des autorités et de l’armée vietnamiennes au tournage du film de Pierre Schoendoerffer sur la bataille de Dien Bien Phu, la coopération militaire a fait ses premiers pas entre les services de santé des deux armées, avant de s’étendre progressivement à de nombreux autres domaines : formation, hydrographie, opérations de maintien de la paix, et plus récemment dialogue stratégique, formalisé depuis 2010 dans le cadre d’un comité conjoint de défense. C’est dans ce cadre qu’est abordée la sécurité régionale et le conflit en mer de Chine méridionale que les Vietnamiens appellent mer de l’Est (ou mer Orientale), aujourd’hui leur plus grand défi de sécurité en raison des prétentions territoriales et de l’activisme naval et aérien des Chinois. Pour autant, le partenariat stratégique n’a pas été suivi d’initiatives fortes susceptibles d’en nourrir le contenu et de tempérer les impatiences qui se sont exprimées de part et d’autre.

 

Certains regrettent, en France, que la générosité des crédits d’aide au développement octroyés par la France au Vietnam depuis 1993, et qui font d’elle le 2e pays donateur bilatéral après le Japon, n’ait pas davantage été récompensée, par exemple dans le domaine commercial ou des ventes d’armes. D’autres s’inquiètent du poids de la corruption, que des campagnes très médiatisées tentent de réduire sans grande efficacité, de la faiblesse et du manque d’innovation du secteur privé, ou encore du poids excessif de la dette publique (officiellement 67% du PIB, fin 2015, mais sans doute supérieure à 90% si l’on tient compte en particulier des dettes détenues par les entreprises publiques non comptabilisées dans les statistiques, ce qui la rapproche alors des niveaux français)…

 

Bien que tardive, la visite du président de la République française est bienvenue et devrait permettre de dissiper au moins en partie certaines impatiences. Toute visite présidentielle s’accompagne d’un effort de synthèse et de prospective salutaire, d’accords et de contrats prometteurs, d’une impulsion venue du sommet qui rejaillit pour quelque temps au moins à tous les niveaux de la relation bilatérale. Encore faut-il que, la visite passée, les acteurs de cette relation continuent de s’impliquer pour la faire vivre et grandir.

 

Entre la France et le Vietnam, la coopération est servie par une très grande diversité d’acteurs publics et privés. Rien que la coopération décentralisée, qui fera l’objet de prochaines assises à Can Tho, implique aujourd’hui plus de 500 acteurs institutionnels français différents, relevant aussi bien des collectivités locales que des organisations de solidarité, des centres de recherche ou des hôpitaux français. Les coopérations entre universités et grandes écoles se sont multipliées et la France est aujourd’hui le 3e pays d’accueil des étudiants vietnamiens puisqu’elle en compte plus de 7 000, ce qui en fait la 2e communauté étudiante asiatique en France. Les potentialités de nos relations sont grandes, pour le Vietnam comme pour la France.

 

Avec 6,7% de croissance en 2015, le Vietnam s’affiche comme l’une des économies les plus dynamiques d’Asie et du monde, même si cette croissance est encore trop dépendante de la réexportation (l’exportation à destination d’un pays de marchandises précédemment importées d’un autre, grâce à une main d’œuvre encore bon marché). Il représente un formidable marché, non seulement pour les grandes entreprises françaises, dont certaines sont déjà présentes, mais aussi pour toutes les PME/PMI, TPI et autres start-up qui font la richesse du tissu économique français et que notre diplomatie économique n’a pas suffisamment valorisées ni pensées dans leurs synergies potentielles avec les centres de recherches universitaires et les zones incubatrices d’entreprises. La prochaine visite présidentielle pourrait en être l’occasion.

 

Les relations économiques et commerciales de la France avec ce pays, où sont déjà implantées plus de 300 entreprises françaises, devraient aussi bénéficier de l’accord de libre-échange signé en décembre 2015 entre l’Union Européenne et le Vietnam, dont l’entrée en vigueur est prévue en 2018. Les perspectives ne sont pas négligeables car les Vietnamiens s’intéressent particulièrement aux savoir-faire et aux produits français dans des domaines aussi divers que les sciences et technologiques, l’industrie du luxe, l’agroalimentaire, l’environnement, l’urbanisme ou encore le secteur médical et pharmaceutique : à nous de mieux cibler leurs besoins et de les convaincre que la liste est exponentielle… Ces potentialités sont toutefois confrontées à un contexte régional de concurrence accrue par la multiplication de plusieurs initiatives commerciales d’envergure, à l’échelle régionale ou transrégionale, telles que la communauté économique de l’ASEAN (2015) et, surtout, l’ambitieux accord de partenariat transpacifique – le « TPP » – signé début 2016 par le Vietnam, les États-Unis et 10 autres pays de la zone Asie-Pacifique.

 

Très ouverts aux produits étrangers, les Vietnamiens sont aussi avides de connaissance, de culture et d’art. Contrairement à ce que les chiffres et les préjugés donnent à croire, la francophonie, bien qu’inférieure à 1% de la population, n’y est pas morte. Tandis qu’on présuppose à tort que tout le Vietnam a été francophone à l’époque coloniale, en oubliant que l’enseignement « franco-indigène » n’a jamais concerné qu’une infime minorité de Vietnamiens, on regrette généralement, en France, la disparition des derniers témoins de l’ancienne génération formée dans les établissements scolaires français pendant la période coloniale et jusqu’en 1975 au Sud-Vietnam.

 

La mort du général Vo Nguyen Giap, en 2013, a semblé entériner la fin de la greffe francophone au Vietnam. En plus d’être lui-même un brillant francophone, le héros des résistances « antifrançaise » et « antiaméricaine » s’était aussi révélé un ardent défenseur de la survie de la francophonie dans son pays. Or, l’adhésion essentiellement géopolitique du Vietnam à la Francophonie multilatérale s’est doublée, dès les années 1990, d’un programme de formation, modeste mais non négligeable, de nouvelles générations de lycéens et d’étudiants dans les classes bilingues de l’enseignement secondaire et à l’Université. Moins visible mais pas moins combative pour éviter la « catastrophe écologique » redoutée par Jacques Chirac, la relève existe.

 

Le département de langue et de culture françaises de l’Université nationale du Vietnam à Hanoï – où le président Hollande prononcera un grand discours, le 6 septembre – accueillera à la rentrée 50% d’étudiants supplémentaires par rapport à 2015. L’un des plus importants centres universitaires francophones du Vietnam, il comptera 500 étudiants, rien qu’en français, et 1 000 étudiants venus d’autres disciplines qui ont choisi le français comme première langue étrangère. Au-delà de ces chiffres qui ne reflètent évidemment pas une réalité nationale globalement moins optimiste, il faut avoir mesuré les efforts, les sacrifices, la détermination et jusqu’à la passion des Vietnamiens de tous âges qui ont investi notre langue et notre culture, pour comprendre à quel point ils ont besoin d’être soutenus et encouragés, au Vietnam comme en France. Leur persévérance nous oblige d’autant plus qu’elle traduit souvent un profond attachement à nos valeurs républicaines.

 

De même, ne devons-nous pas nous détourner des séquelles de la guerre, même si elles se sont heureusement estompées, ou laisser à d’autres le soin de les guérir. À beaucoup de visiteurs, la guerre paraît loin car ses effets sont de moins en moins visibles. Or, depuis la fin de la guerre au Vietnam, des dizaines de milliers d’habitants ont été victimes de munitions non explosées ; plusieurs millions d’entre eux ont souffert, par contamination directe ou indirecte, des conséquences de la guerre chimique conduite par les Américains et leurs alliés sud-vietnamiens, entre 1961 et 1971.

 

Les scientifiques ont de bonnes raisons de penser que les effets de la dioxine contenue dans l’Agent orange et les autres défoliants se sont transmis génétiquement aux générations suivantes. Nous en serions à la quatrième génération d’enfants handicapés, malades, défigurés et malformés. Mais les études pour le prouver coûtent cher. L’impératif de solidarité qui a animé notre diplomatie et tant de nos compatriotes pendant la guerre du Vietnam ne doit pas être sacrifié sur l’autel des intérêts géopolitiques et économiques.

 

Plusieurs associations françaises et vietnamiennes ont fait du combat pour la reconnaissance de ce scandale sanitaire leur cheval de bataille, parfois même de longue date. Cependant, au nom des compétences scientifiques qu’elle possède sur les perturbateurs endocriniens, de l’ancienneté et de la qualité de la coopération médicale franco-vietnamienne, la France pourrait aller au-delà. Elle s’honorerait, par exemple, à prendre l’initiative de créer un groupe d’experts capables d’établir les preuves scientifiques des effets transgénérationnels de l’Agent orange et de prendre en charge une partie des patients. Si les plus chanceux de ces derniers sont soignés dans des hôpitaux et des villages médicalisés au Vietnam, beaucoup sont encore cachés dans des familles en grande souffrance qui assimilent le handicap à une malédiction.

 

La guerre coule dans le sang des Vietnamiens d’une façon plus invisible encore. Elle est inscrite au plus profond de l’ADN de ce peuple dont le destin collectif a été forgé à l’épreuve de multiples guerres internes mais aussi et surtout de conflits asymétriques longs et récurrents, au fil des siècles, contre les armées des dynasties chinoises ou sino-mongoles, plus tard et plus brièvement occidentales. Or, la résurgence de la puissance chinoise en Asie et des tensions en mer de Chine méridionale, depuis le tournant des années 2000-2010, pousse les dirigeants vietnamiens à équilibrer leurs relations avec les États-Unis, pour le moment seuls susceptibles de contenir les ambitions chinoises.

 

Comme le Vietnam ne peut non plus se permettre de rompre avec la deuxième puissance économique et militaire mondiale qui est aussi son premier partenaire commercial, en se rapprochant à l’excès de Washington, il renforce ses relations avec d’autres puissances régionales, tels le Japon, l’Inde ou l’Australie, tout en se montrant ouvert à un approfondissement de ses coopérations politico-stratégiques avec la France et l’Europe. Ainsi renforce-t-il sans coût excessif sa profondeur stratégique. Ici, toutefois, prudence est mère de sûreté. L’observateur averti sait qu’au Vietnam, le nationalisme réveillé par une commune perception de la « menace » chinoise transcende tous les ferments de division, sans exception, et devient vite indomptable, au point que le régime communiste pourrait craindre pour sa survie s’il se montrait trop faible vis-à-vis d’elle.

 

La France, dans ce domaine, ne devrait pas se cantonner à des échanges de vue, pour importants qu’ils soient, ni au rôle d’exportateur d’armements qu’elle joue déjà activement dans une région en voie de modernisation militaire rapide et potentiellement inquiétante. Forte d’une bonne relation diplomatique avec la Chine, qui a d’ailleurs facilité le succès de certaines grandes négociations multilatérales sur de grands enjeux transnationaux susceptibles de rejaillir positivement sur le Vietnam, comme la COP 21, et d’une relation plus équilibrée qu’auparavant avec les pays de l’ASEAN, elle aurait intérêt à renouer avec une posture médiatrice volontariste et de préférence concertée avec ses partenaires européens.

 

Dans un environnement sécuritaire aussi instable, l’attachement commun de nos deux pays, comme de l’Union européenne, au « règlement pacifique des différends dans le respect du droit international », tel qu’il est réaffirmé dans l’article 5 de la déclaration sur le partenariat stratégique franco-vietnamien, pourrait conduire notre diplomatie à nourrir une approche à la fois plus politique et plus régionale de sa relation avec le Vietnam. N’est-ce pas, en définitive, ce que suggère la coïncidence chronologique entre la visite de François Hollande, le cinquantenaire du discours du général de Gaulle à Phnom Penh et les 25 ans de l’Accord de Paris sur le Cambodge, qui constituent tous deux des marqueurs historiques forts de notre relation politique avec cette région du monde ? En renouant avec un tel héritage, la France ne pourrait-elle pas développer plus facilement sa présence économique, dont la faiblesse au Vietnam comme dans toute l’Asie du Sud-Est ne cesse à juste titre d’être déplorée ?

 

Enfin, si l’on tient absolument à faire abstraction des nombreux atouts politico-stratégiques, économiques et culturels propices au rapprochement franco-vietnamien, pour démontrer combien les Français peuvent tirer profit d’une plus grande fréquentation du Vietnam et de ses habitants, l’on se contentera de rappeler, d’après deux classements distincts, que si les Français sont considérés comme l’une des nations les plus pessimistes du monde, les Vietnamiens se classent au deuxième rang mondial des pays les plus heureux !

 

(1) Par Pierre Journoud, professeur d’histoire contemporaine à l’Université Paul-Valéry Montpellier, cofondateur du GIS « ESPRIT » (Études en Politiques, Stratégies, et Relations Internationales).

 

Pour aller plus loin :

 

  • Niagalé Bagayoko et Frédéric Ramel (dir.), Francophonie et profondeur stratégique, études de l’IRSEM, n°26, 2013;
  • Pierre Brocheux et Daniel Hémery, Indochine, la colonisation ambiguë, Paris, La Découverte, 2001 (2e éd.).
  • Christopher Goscha et Benoît de Tréglodé (dir.), Naissance d’un État-parti. Le Vietnam depuis 1945, Paris, Les Indes Savantes, 2004.
  • « Le Viêtnam depuis 2000 ans », dossier de L’Histoire – les collections, n°62, janvier-mars 2014.
  • « Les enjeux géopolitiques du Viêt Nam », dossier d’Hérodote, n°157, 2e trimestre 2015.
  • Pierre Journoud, De Gaulle et le Vietnam (1945-1969). La réconciliation, Paris, Tallandier, 2011.
  • Pierre Journoud (dir.), L’évolution du débat stratégique en Asie du Sud-Est depuis 1945, études de l’Irsem, n°14, 2012;
  • Pierre Journoud et Hugues Tertrais, Paroles de Dien Bien Phu. Les survivants témoignent, Paris Tallandier, coll. Texto, 2012.
  • Stéphane Dovert et Benoît de Tréglodé (dir.), Vietnam contemporain, Paris, IRASEC/Les Indes Savantes, 2009 (seconde édition revue et actualisée).
  • Philippe Papin, Vietnam. Parcours d’une nation, Paris, Belin, 2003.
  • Hugues Tertrais, Atlas des guerres d’Indochine, 1940-1990. De l’Indochine française à l’ouverture internationale, Paris, Autrement, 2004.